Antonio de Oliveira Salazar – entretien avec Jean-Claude Rolinat

Antonio de Oliveira Salazar (1889-1970) fut le chef de l’Etat — nationaliste et catholique — portugais durant quarante-deux ans (record européen dans la catégorie des « méchants dictateurs »).
Réputé pour son humilité et son mode de vie particulièrement sobre, il a tenté de mener une politique conforme à la doctrine sociale de l’Eglise.
Au sujet de cette personnalité finalement assez peu connue, on avait surtout la biographie de Jacques Ploncard d’Assac.(1)Salazar, éditions DMM, 1983. 364 pages, 24 €. Disponible ici.
Elle vient d’être complétée par un ouvrage bref mais dense et fort instructif, signé de Jean-Claude Rolinat : Salazar, le regretté.(2)Editions Les Bouquins de Synthèse nationale, 2012. 164 pages, 18 €. Disponible ici.
Celui de Ploncard est sans doute plus détaillé et fait de longues considérations politiques qu’il est nécessaire de replacer dans le contexte de l’époque (il fut écrit au début des années 60) pour les comprendre. Il est assez précis et fournit beaucoup de détails vécus par l’auteur.
Afficher l'image d'origineLe livre de Jean-Claude Rolinat, récemment paru, est plus facile à lire. Il va à l’essentiel et permet de comprendre l’histoire du Doutor (il était ainsi appelé par ses partisans) ainsi que celle du Portugal du XXe siècle.
C’est un livre destiné à la « vulgarisation », aisément compréhensible. En dépit de ce que son titre peut laisser croire, il  ne s’agit pas d’une hagiographie mais d’un texte à la fois synthétique et précis sur l’homme, sa vie, son œuvre, sa politique, et, à travers tout cela, sur une page de l’histoire du Portugal.

Jacques Meunier

L’Héritage : d’où vous est venue l’idée d’écrire ce livre ?

Jean-Claude Rolinat : Oliveira  Salazar m’a toujours intéressé et  intrigué comme personnage historique. Au tout début des années soixante, alors que j’étais un très jeune adulte, l’Algérie française mourait. En même temps, les provinces portugaises d’outre-mer, selon la terminologie officielle de Lisbonne, étaient agressées par la subversion marxiste qui entretenait des guérillas naissantes : PAIGC en Guinée Bissau, UPA, puis MPLA prosoviétique et UNITA prochinoise (avant de devenir l’instrument des occidentaux comme le FNLA   d’ailleurs, lors de l’indépendance en 1975), sans oublier le FRELIMO au Mozambique. Le Portugal, héroïque petit pays à la tête d’un Empire gigantesque, multi-ethnique et pluri-continental, m’apparaissait alors comme le continuateur dans ses possessions de ce que nous avions raté dans les nôtres. J’étais jeune et je n’avais pas bien analysé à l’époque les rapports de force et les évolutions démographiques… Visitant ce pays à la pointe occidentale de l’Europe, je me suis plongé dans la lecture de sa…constitution, j’ai observé avec  attention le fonctionnement et l’évolution de ses institutions, j’ai lu « Salazar dans le texte », des écrits très Maurrassiens d’esprit, — d’ailleurs les deux hommes  ont entretenu une correspondance suivie —,bref dans l’ambiance gaulliste du désengagement français de son Empire, le Portugal me « vengeait » en quelque sorte par procuration !

Comment caractériseriez-vous le régime de Salazar et en quoi se distingue-t-il de ceux de Mussolini et Franco ?

Afficher l'image d'origineJ-C R. : La seule ressemblance avec le régime de Benito  Mussolini est dans l’adoption du corporatisme pour l’organisation économique et sociale. Même si l’Union Nationale, la future Action Nationale Populaire était de fait le parti unique comme pouvait l’être le Parti fasciste à Rome, la constitution portugaise restait dans la lettre une loi fondamentale d’esprit parlementaire, avec le jeu  rituel des élections. Pas de culte de la personnalité semblable à celui qui entourait le leader italien, contrairement à ce dernier peu de rassemblements de foules à haranguer. Même remarque vis-à-vis du franquisme, système politique reposant sur un homme fédérant toutes les tendances du Movimiento. Par contre, ce qui rapprochait les deux pays de la péninsule ibérique, c’était la place prépondérante de l’Eglise  dans la société, l’exaltation du patriotisme et un farouche anticommunisme.

Et comment caractériseriez-vous l’homme lui-même ?

J-C R. : Oliveira Salazar, né le  28 avril 1889  dans une famille modeste, était un intellectuel brillant, très pieux, austère et travailleur, d’une probité inattaquable,  cette dernière vertu étant sous nos cieux et à notre époque, vous me l’accorderez, plutôt rare ! Il avait une très haute idée de sa fonction. Appelé une première fois aux affaires par les militaires en 1926, il lui fallut attendre d’avoir les pleins pouvoirs en 1932 pour instaurer en mars 1933 l’Estado Novo après un plébiscite électoralement gagné. Le  pays sortait d’une longue crise politique après l’assassinat du Roi et de son héritier en 1908 et l’instabilité des gouvernements républicains successifs. De gré ou de force, il allait rendre le Portugal  gouvernable : « Les institutions et les lois doivent fonctionner de telle manière qu’elles obligent à être patriote quiconque ne l’est pas par discipline ou par vertu », disait-il. Vous imaginez les réactions si un responsable politique tenait un tel discours de nos jours ce qui dénote, en passant, la spirale de décadence dans laquelle nous tourbillonnons ! La vérité c’était que le Portugal était ingouvernable et qu’il lui fallait, pour progresser, un homme à poigne. Salazar fut cet homme-là. Solitaire tout en étant proche du petit peuple et contrairement au  général Franco qui industrialisa massivement l’Espagne, l’ancien séminariste, l’universitaire de Coïmbra qui craignait un monde ouvrier syndicalisé, un prolétariat revendicatif, misait plutôt sur la petite paysannerie : « un arpent de vignes et une paire de bœufs »…

Que pensez-vous de l’argument courant selon lequel le salazarisme a plongé ou maintenu le Portugal dans la pauvreté ?

LIRE LA SUITE DE CET ENTRETIEN DANS L’HÉRITAGE N°8 :

Notes   [ + ]

1. Salazar, éditions DMM, 1983. 364 pages, 24 €. Disponible ici.
2. Editions Les Bouquins de Synthèse nationale, 2012. 164 pages, 18 €. Disponible ici.

Saint Louis

Par Angélique Provost

Sa vie

C’est le 25 avril 1214, à Poissy, que Blanche de Castille et Louis VIII donnèrent naissance à leur bien-aimé fils Louis. L’enfant  ne grandira que douze ans aux côtés de son père, avant de se voir octroyer les fonctions royales, à la cathédrale de Reims, le 26 novembre 1226. Fonctions alors remises à sa pieuse mère jusqu’à sa majorité.

Ces neuf années de régence furent également celles de l’éducation du futur monarque à l’école de Blanche de Castille. Chacun sait la tendre rigueur avec laquelle elle éleva son enfant, à travers son précepte premier : « Mon fils, je préfèrerais vous voir mort à mes pieds que de vous savoir coupable d’un seul péché mortel ».

Sa majorité venue, chacun put en mesurer l’efficacité : à vingt-et-un ans, Louis était roi, actif, ferme, pondéré et juste, digne héritier de la lignée capétienne dont il était issu. Sa fermeté lui fit tenir tête aux évêques de son royaume lorsque ce fut nécessaire. Il ne se laissa pas impressionner par le statut de prélat. Dans un souci de justice, il punissait ceux qui abusaient de leur autorité spirituelle dans le royaume temporel, malgré la protection que leur accordait le pape Grégoire IX. Il savait cependant faire preuve du respect et de la soumission dus au Saint Père. Innocent IV — sous le pontificat duquel notre bon roi dut faire face aux querelles entre le Sacerdoce et l’Empire, mais aussi à la croisade —, couvrit le souverain d’éloges (scène émouvante que Louis Jean François Lagrenée mit en peinture) : « C’est vous, notre très cher fils, vous, le prince le plus glorieux de l’univers devant Dieu et devant les hommes (…) qui avez décidé de venir immédiatement à notre secours… »

Louis fut un roi sainement ambitieux. Affranchi de la tutelle maternelle en 1242, il ouvrit alors une ère de traités, d’agrandissement du territoire et de réconciliation. Il matta la révolte des seigneurs du Midi le 30 octobre 1242 en signant le traité de Lorris avec Raymond VII. Celui-ci renonça à Narbonne et Albi et s’engagea à combattre l’hérésie cathare. Quelque années plus tard, le 28 mai 1258, le roi d’Angleterre Henri III Plantagenêt et le roi de France Louis IX signèrent le traité de Paris, mettant ainsi fin à un conflit datant de plus d’un siècle. Enfin, par le traité de Corbeil du 11 mai 1258, Louis IX abandonna sa suzeraineté sur Barcelone et le Roussillon. En échange, Jacques Ier d’Aragon renonça à ses droits sur la Provence et le Languedoc. Pour sceller ce traité, Louis IX maria sa fille Blanche avec l’infant de Castille, Ferdinand de la Cerda, et Jacques Ier d’Aragon maria la sienne, l’infante Isabelle, avec le fils de Louis IX, le futur Philippe III.

En décembre 1244, le roi Louis IX tomba gravement malade et sentit venir la mort. En cas de guérison, il promit à Dieu de partir en croisade. Quelques semaines plus tard, son rétablissement fut miraculeux : il tiendra parole. Malgré les tentatives de dissuasion d’une mère aimante, rétabli, le roi s’apprêta à partir pour les royaumes chrétiens d’Orient en difficulté. C’est le 12 juin 1248, que saint Louis, roi de France, brandit l’oriflamme de ses ancêtres capétiens en la basilique de Saint-Denis et part avec son épouse la reine Marguerite de Provence, et ses trois frères, Robert Ier d’Artois, Charles d’Anjou et Alphonse de Poitiers.

Cette première croisade sera marquée par la captivité du roi Louis : une première dans l’histoire de France. Avec la plupart de ses soldats, il sera fait prisonnier par les mamelouks, maîtres de l’Egypte, au cours de la bataille de Fariskur. C’est à l’Ordre du Temple qu’ils durent une libération coûteuse, en mai 1250, un mois après le début de leur captivité.

LIRE LA SUITE DE CET ARTICLE DANS L’HÉRITAGE n°10 :

« La Réforme, cette révolution », d’Alain Pascal

« Le siècle de la folie », Ed. des Cimes, 624 p., 28 €, 2014. Disponible ici.

Ce dernier livre publié, inédit, traite de ce qui a été appelé communément (et de façon impropre) la « Réforme »(1)la véritable réforme étant… la « Contre-Réforme »., c’est-à-dire la survenue du « protestantisme ».

Dans cet ouvrage volumineux et dense, l’auteur présente ce phénomène qui ébranla la Civilisation moins comme une réforme que comme une « révolution », d’ailleurs non seulement religieuse mais aussi politique ; car, « au-delà d’un bouleversement du dogme de l’Église et des Sacrements, Luther est responsable du premier nationalisme révolutionnaire, le nationalisme allemand qui s’attaque à l’Empire de Charles Quint. » Une approche peu courante qui donne du sel à cette étude.

Pour résumer la thèse historique d’Alain Pascal, la « Réforme » est « la conséquence de la Renaissance et donc un produit de la gnose et de la Kabbale ». Il fait peu de cas du politiquement correct et c’est heureux, ne s’interdisant d’ailleurs pas de nombreuses digressions politiques actuelles : autant d’analyses supplémentaires offertes au lecteur mais aussi d’occasions de froisser des lecteurs venus d’horizons plus à la mode. Tant pis, ou tant mieux car il est parfois salutaire à certains de voir chahutées des certitudes douteuses inculquées par les médias ou l’école publique.

Tout d’abord, Alain Pascal replace cette nouvelle étude dans la perspective de sa série la Guerre des gnoses, dont la Réforme serait un aboutissement, à la suite de la « Renaissance » et de son Humanisme (triomphant avec l’Eloge de la Folie d’Erasme(2)ce traité étant carrément une transcription de «  la Kabbale, [et] une véritable déclaration de guerre contre le rationalisme scolastique ».).

Se penchant ensuite sur Luther, qu’il décrit comme un « superstitieux » et « l’anti- saint Thomas d’Aquin », il en expose les influences gnostiques et kabbalistiques.

« Hérétique néo-platonicien », Luther a une conception irrationnelle de la foi ; n’ayant rien compris à la scolastique et d’un orgueil démesuré, pour créer son système, il oppose faussement saint Augustin à saint Thomas d’Aquin.

Alain Pascal s’attarde sur les rapports entre Luther et les Humanistes, ces derniers poussant l’hérésiarque à l’attaque. Il entend montrer « comment Luther insère le nationalisme allemand dans la guerre Humaniste contre l’Église » et comment il s’attaque à la tradition de l’Occident, annonçant finalement les « effroyables temps modernes ».

Dans la deuxième partie de l’ouvrage, Alain Pascal s’attarde, sans détour et sans mettre de gants, sur les influences démoniaques de Luther et aborde même la question peu connue des rencontres entre ce dernier et… le Diable (racontées par Luther). Puis il évoque « le luthéranisme politique et l’histoire secrète du nationalisme allemand » avant de revenir sur les liens entre la Kabbale et la révolution luthérienne, d›exposer « comment le protestantisme est l’islam  d’Occident »

Ce volumineux pavé, qui n’est pas d’une lecture très aisée, est un véritable puits de données généralement peu connues et il propose des analyses parfois audacieuses, mais toujours dignes d’intérêt et stimulantes, même si l’on peut être en désaccord avec l’auteur.
Ses index ainsi que sa table des matières détaillée en font un bon outil de travail.

Jacques Meunier

[tiré de L’Héritage n°10]


Notes   [ + ]

1. la véritable réforme étant… la « Contre-Réforme ».
2. ce traité étant carrément une transcription de «  la Kabbale, [et] une véritable déclaration de guerre contre le rationalisme scolastique ».

« L’Héritage de Vichy »

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Ed. Armand Colin, 237 p., 27,5 €, 2012

L’Héritage de Vichy, « Ces 100 mesures toujours en vigueur », de Cécile Desprairies. Disponible ici.

« L’État français », communément appelé « Régime de Vichy » est unanimement critiqué par la bien-pensance qui nous gouverne.
Le gouvernement du Maréchal Pétain reste systématiquement associé à la Collaboration, au statut des Juifs, à la lutte contre la Franc-Maçonnerie, à un retour à des valeurs traditionnelles (poussiéreuses, cela va sans dire)…
Sait-on pourtant que de nombreuses mesures prises au cours de cette période relativement courte (quatre ans) sont encore en vigueur ?

Dans un livre fort documenté et richement illustré — à la tonalité parfois légèrement partisane et hostile, mais dans les limites du supportable —, Cécile Desprairies nous décrit et détaille ces directives et lois qui sont encore appliquées actuellement…
Elles ne sont que les restes des 16 000 textes de loi édictés par l’Etat Français : le régime nationaliste fit en effet preuve d’une activité législative intense, novatrice et créative.
Même s’il faut reconnaître que certaines mesures sont héritées des projets du Front Populaire, tandis que d’autres ont été imposées par l’Occupant allemand ou sont simplement le fruit de circonstances.

Nous ne pouvons pas détailler ici l’ensemble de ces textes mais nous notons l’ambition de Vichy de transformer la société française en profondeur en vue d’un retour au réel, ainsi que la volonté ferme de l’amélioration de l’état physique et moral de la nation.
Toutes ces mesures ne sont certes pas dictées par ces impératifs mais il s’agit de modifications concrètes d’habitudes (de santé, d’alimentation, de vie quotidienne,…) qui généralement relèvent à l’évidence du bon sens.

Par exemple, la Licence IV, si précieuse pour un établissement désirant faire commerce d’alcool, a été lancée pour lutter contre l’alcoolisme très présent en ces temps difficiles. Cette licence permettait d’éviter qu’un trop grand nombre de cafés ou bars pullulent sur un territoire donné.
La lutte contre la consommation exagérée de l’alcool est importante pour Vichy, qui met, entre autres, fin au droit de bouilleur de cru.(1)possibilité pour un particulier de distiller son propre alcool.
Afin de protéger les plus fragiles, un salaire minimum est institué (l’ancêtre de notre SMIC), tout comme le menu « plat du jour » le midi dans les brasseries, l’arbre de Noël dans les entreprises, le « ticket de repas » (qui devint par la suite le titre-restaurant)…
C’est à Vichy que nous devons des inventions aussi élémentaires que la carte nationale d’identité ou le code de la route (mis en place pour faciliter la communication avec l’Occupant allemand) mais aussi le numéro de Sécurité sociale.
L’Etat Français intervient aussi dans le domaine professionnel avec la création de l’Ordre des médecins,(2)Nul ne pourra exercer la médecine s’il n’est habilité par le Conseil de l’Ordre. Une des erreurs du Maréchal Pétain sera d’accepter, comme conséquence, l’interdiction des études et du diplôme d’herboristerie. des Experts comptables  mais aussi du médecin-inspecteur du travail, du métier de masseur kinésithérapeute…
C’est en 1941 que sont créés les Groupements Mobiles de Réserve, ancêtres de nos bons amis les CRS…
Le régime du Maréchal Pétain intervient aussi de façon notable dans le sport : introduction du handball (sport alors essentiellement allemand), promeut et assoit le rugby à XV (au détriment du rugby à XIII jugé trop anglais), introduit le sport au baccalauréat,…

La Famille est mise à l’honneur avec l’institution de la célèbre Fête des mères en 1941, l’extension des allocations familiales, la protection médicale de la mère et des jeunes enfants (afin d’éviter les morts en bas âge). L’accouchement sous X est aussi créé à ce moment.

On note aussi la volonté de rompre avec la mentalité laïcarde de la IIIe République par le renouveau des Pèlerinages dont le plus illustre est celui de Lourdes. Plusieurs lieux de culte sont ainsi classés au titre des monuments historiques et le Maréchal se rend dans de nombreux sanctuaires dont celui de Notre-Dame de France au Puy en Velay.
Les congrégations qui étaient bannies de France depuis le début du XXe siècle peuvent désormais revenir s’y installer, tel l’ordre des Chartreux qui est reconnu par une loi de 1941.

Nous ne résistons pas au plaisir de laisser le mot de la fin à un proche spectateur, sinon acteur, de l’époque de Vichy :
« Dans le domaine financier et économique, ces technocrates [ceux de Vichy] s’étaient conduits, malgré toutes les traverses, avec une incontestable habileté. […] Les doctrines sociales de la Révolution nationale, organisation corporative, Charte du Travail, privilèges de la famille, comportaient des idées qui n’étaient pas sans intérêt… ». Ainsi s’exprimait au soir de sa vie, Charles de Gaulle dans ses Mémoires de Guerre (Tome III).

Thierry Beaudier et Jacques Meunier

[tiré de L’Héritage n°10]


Notes   [ + ]

1. possibilité pour un particulier de distiller son propre alcool.
2. Nul ne pourra exercer la médecine s’il n’est habilité par le Conseil de l’Ordre. Une des erreurs du Maréchal Pétain sera d’accepter, comme conséquence, l’interdiction des études et du diplôme d’herboristerie.

Les quatre causes

Il peut être utile de présenter quelques précisions sur le vocabulaire philosophique.

A la suite d’Aristote, saint Thomas d’Aquin recourt aux « quatre causes », qui permettent d’analyser précisément « tout être corporel substantiel, quel qu’il soit » : les causes matérielle, formelle, efficiente et finale.

– La cause matérielle est ce qui, dans le sujet, est susceptible de recevoir une détermination : la matière utilisée.
– La cause formelle est ce en quoi l’effet est, ce qui fait qu’il est ce qu’il est ; c’est ce que l’être représente, la définition de la chose.
– La cause efficiente est ce qui effectue le changement ;
– La cause finale est ce vers quoi le changement se produit.

Les deux premières causes sont dites « intrinsèques » en ce qu’elles constituent le sujet en son être même, et les deux dernières causes sont dites « extrinsèques », car elles ne sont pas constitutives de l’être de la chose.
Prenons un exemple pour illustrer cela.

Soit un sculpteur travaillant un bloc de marbre ; ce dernier est la matière : elle est informe (par rapport à l’objet désiré).
L’artiste taille le bloc, à l’aide de son burin : il lui donne une forme et en fait, par exemple, une statue. Matière et forme sont les causes intrinsèques ou internes à l’objet.
Le sculpteur qui impose la forme à la matière est, quant à lui, la cause efficiente.
Si l’on veut cerner complètement la réalité, il convient de distinguer à côté du sculpteur – cause efficiente -, le burin dont il se sert, et qui reçoit le nom de cause instrumentale. Mais cette statue a un but : décorer une pièce, par exemple ; c’est la cause finale.
Cause efficiente et cause finale sont extérieures à l’objet, c’est pourquoi les philosophes les nomment extrinsèques.

[tiré de L’Héritage n°8]


« Poèmes de Fresnes », de Robert Brasillach

Poèmes de Fresnes, par Robert Brasillach, Éd. des Cimes, 56 p., 9 €. En vente ici.

Écrivain reconnu et journaliste engagé, Robert Brasillach paya cher les choix qu’il fit durant la Deuxième Guerre mondiale.
Il mourut voici un peu plus de  soixante-dix ans, devant un peloton d’exécution.

Condamné à mort pour des écrits, après un procès de six heures et une délibération de vingt minutes, il ne bénéficia d’aucune grâce en dépit d’une large mobilisation de personnalités de divers bords (tels que Paul Valéry, Paul Claudel, François Mauriac, Albert Camus, Marcel Aymé, Jean Cocteau, Jean Anouilh, Thierry Maulnier…).

Aucun des recours déposés par Jacques Isorni, son avocat, n’aboutit.

Robert Brasillach se retrouva donc à la prison de Fresnes, dans le quartier des condamnés à mort.
Les semaines passant, le funeste sort qui l’attendait se fit de plus en plus certain.
Durant ses quelques mois de captivité, il rédigea secrètement de magnifiques poèmes (il n’avait droit ni à un stylo, ni à du papier), jusqu’à l’issue fatale qui le vit tomber sous des balles françaises, le six février 1945, à l’âge de trente-cinq ans.

A l’occasion de cet anniversaire, ces textes écrits en attendant la mort ont été l’objet d’une nouvelle édition (en format de poche : 10 x 16 cm), soignée et plus que bienvenue !
L’Espérance, l’humanité et la générosité des sentiments qui s’y expriment jurent avec la noirceur de cette période particulièrement cruelle et haineuse qui fut appelée « Épuration ».
Ils dévoilent un poète de grand talent, sensible, témoignant d’une hauteur d’âme remarquable.
Un classique, qui donnera sûrement à certains le goût de la poésie !

Jacques Meunier
Tiré de L’Héritage n°10 :

Saint Michel

La connaissance de Saint Michel et a fortiori la dévotion envers lui se tarissent toujours davantage au royaume des lys.
C’est une chose grave : d’abord parce qu’il occupe une place éminente dans le plan divin, et ensuite parce qu’il a une relation privilégiée avec notre nation.

Saint Michel, prince des armées de Dieu

Puisque leur confrontation est le premier fait qui nous est connu de l’archange, il est impossible de parler de Saint Michel sans évoquer Lucifer.
Ce dernier était la plus belle, la plus grande de toutes ces créatures purement spirituelles que sont les anges.

Les Docteurs lui appliquent le passage suivant d’Ezéchiel :
« Tu étais l’empreinte de la ressemblance de ton Créateur, tu étais plein de sagesse et parfait en beauté. Tu étais dans les délices du paradis de Dieu.
Toutes les pierreries ornaient ton vêtement : la sardoine, la topaze, le jaspe, la chrysolithe, l’onyx, le béryl, le saphir, l’escarboucle et l’émeraude.(1)Ces neuf pierres représentent les dons distribués entre les neuf chœurs des anges, et que Lucifer comme leur chef possédait à lui seul.
L’or brillait sur tes vêtements et toutes sortes d’instruments de musique ont été préparés pour célébrer ta naissance.
Tu étais comme les chérubins à l’aile puissante et protectrice.
Et je t’ai placé sur la montagne sainte de Dieu, tu as marché parmi les pierres de feu.(2)C’est-à-dire qu’il occupait parmi les êtres créés jusque-là la première place.
En un mot, tu étais parfait dans tes voies dès le jour de la création, jusqu’au moment où l’iniquité s’est trouvée en toi. » (Ezéchiel XXVIII, 12-15).

Ebloui par son immense puissance, il se rebella contre Dieu et prononça son fameux “non serviam” (“je ne servirai pas”), probablement en prenant connaissance du projet de l’Incarnation, et refusant par orgueil d’adorer un Dieu-Homme.
Il entraîna dans sa chute une grande quantité d’anges, un tiers, d’après la tradition.(3)En se basant sur ce passage de l’Apocalypse (XII, 3-4) : « un grand dragon rouge, ayant sept têtes et dix cornes, et sur ses têtes sept diadèmes. Sa queue entraînait le tiers des étoiles du ciel, et les jetait sur la terre. » Les anges sont souvent comparés aux étoiles dans la Bible, puisqu’ils appartiennent tous à un « monde céleste ».

S’en suivit un grand combat entre les créatures spirituelles, pour lequel Michel prit la tête des anges fidèles. Dieu jugea indigne de lui d’employer Sa main toute-puissante pour frapper des ennemis qui, en Sa présence, n’étaient que néant ; Il voulut leur infliger l’humiliation d’être vaincus par leurs égaux ; Il voulut laisser à Ses amis le mérite et la gloire de Le venger et de Lui montrer leur fidélité.
Michel répondit à Lucifer en s’écriant “Quis ut Deus ?” (“Qui est semblable à Dieu?”), rappelant la vanité absolue de l’orgueil et de toute rébellion contre Dieu. Ce cri lui donna son nom et sa devise.

Humilité et fidélité caractérisent Saint Michel.

Saint Michel et son armée triomphèrent des révoltés, qu’on appellera désormais les démons :
« Et il y eut guerre dans le ciel. Michel et ses anges combattirent contre le dragon. Et le dragon et ses anges combattirent, mais ils ne furent pas les plus forts, et leur place ne fut plus trouvée dans le ciel. Et il fut précipité, le grand dragon, le serpent ancien, appelé le diable et Satan, celui qui séduit toute la terre, il fut précipité sur la terre, et ses anges furent précipités avec lui. » (Apocalypse XII, 7-9)

Michel prit dès lors le titre de prince de la milice céleste, et devint le champion des gens de Dieu contre les forces des Ténèbres (il est d’ailleurs particulièrement invoqué lors des exorcismes). Il est naturellement le saint patron des guerriers, comme de nombreux corps de métiers.

Saint Michel, protecteur du peuple de Dieu

Il est chargé de la défense des droits de Dieu, de son peuple, et de son épouse, la sainte Eglise.(4)L’archange Gabriel dit au prophète Daniel : « Michel se tient constamment debout pour la défense du peuple de Dieu ».

Quand le féroce Attila, après avoir semé la terreur parmi les peuples, arriva devant un faible vieillard, le pape saint Léon, aux portes de Rome, il eut une apparition qu’il décrivit à ses hordes barbares : « J’ai vu, à côté du vieillard, un personnage revêtu d’habits sacerdotaux, avec une épée nue et un air si terrible que j’en ai été effrayé ». C’était saint Michel, protecteur du souverain Pontife et de l’Eglise.

Saint Michel, « psychopompe »

Cet adjectif signifie qu’il est chargé de mener les âmes des morts à leur dernière demeure après le Jugement. C’est d’ailleurs à ce titre qu’il est cité dans l’offertoire de la messe des défunts.

Devant peser les âmes des trépassés, il est souvent représenté tenant une balance à la main. Après le Christ, bien sûr, il tient la seconde place lors du Jugement dernier.
S’appuyant sur saint Thomas, Bellarmin et Suarez déclarent que saint Michel est l’Ange patron de la bonne mort. Ce rôle supérieur justifie donc une fervente dévotion à Saint Michel, réputé pour être très soucieux du salut de ceux qui lui rendent un culte. On lui impute ainsi plusieurs miracles permettant à certains de ses serviteurs de voir leur mort reculée de quelques jours, leur laissant le temps de s’y préparer.

Cette bienveillance active explique l’étonnante parole de Saint Alphonse de Liguori : « la dévotion à saint Michel est un signe de prédestination ».


Saint Michel pesant les âmes.
A gauche, le Diable, aidé d’un démon, tente de perturber l’archange et de faire pencher la balance de son côté, en vain.

Saint Michel et la France

Les véritables nations ont, comme les individus, chacune un ange tutélaire(5)Le prophète Daniel parle de l’opposition entre Saint Michel, protecteur de l’ancien Israël, et l’ange gardien de la Perse. qui a pour charge de les éclairer, de les guider et de les protéger tant qu’elles sont fidèles à la mission que le Créateur leur confie.

Or l’ange gardien de la France n’est autre que saint Michel lui-même !
Quel motif d’espérance pour tous les patriotes effrayés par l’état de putréfaction de la France ! Quel sujet de honte pour tous les traîtres catholiques qui renient notre nation, notamment au profit de chimères européistes ou séparatistes…

Quand jadis les Hébreux maintenaient tant bien que mal le vrai culte au milieu des peuples païens, Michel protégeait cette nation élue.
Puis, une fois le judaïsme ancien rendu caduc par l’avènement du Christ, il semble que ce soit à l’Empire romain, devenu chrétien, qu’échut ce rôle de « champion de Dieu » parmi les peuples. Mais les successeurs de Constantin failliront et l’Empire disparaîtra sous les invasions…
C’est ensuite le peuple franc qui va endosser le rôle glorieux « d’épée et de bouclier de l’Église ».

Le pacte est scellé près de Tolbiac, lors d’une bataille contre les Alamans, où Clovis et ses hommes sont dans une posture désespérée. Suite aux efforts, à la patience et aux prières de son épouse sainte Clotilde, le roi des Francs promet au Dieu des Chrétiens de se convertir s’il lui accorde la victoire.
Le miracle se produit(6)D’après certains auteurs, Michel apparut, combattit et terrifia les Alamans, nous donnant ainsi miraculeusement la victoire. et Clovis se fait baptiser avec ses guerriers, entraînant la conversion de tout le royaume.
La France, première nation chrétienne, prend la tête de toutes les autres.

Le pape Anastase écrit à Clovis : “Daigne le Seigneur accorder à vous et à votre royaume sa divine protection ; qu’il ordonne à saint Michel, qui est votre prince et est établi pour les enfants de votre peuple, de vous garder dans toutes vos voies, et de vous donner la victoire sur tous vos ennemis”.

Depuis, l’archange a accompagné attentivement la marche du peuple franc à travers les siècles, multipliant les interventions.

Ainsi Charles Martel enverra son épée au Mont Saint Michel, estimant avoir été assisté surnaturellement par l’ange. Pour les mêmes raisons, Charlemagne, après son expédition contre les Saxons, fera peindre l’image de St Michel sur ses drapeaux avec la devise « Voici Michel qui m’a secouru ».
De nombreux monarques français feront œuvre de piété publique envers Saint Michel, notamment en marchant vers le Mont.

Alors que tout semblait perdu pour notre nation, Saint Michel va exhorter Jeanne d’Arc(7)A cette occasion, Saint Michel se présente à la jeune bergère comme “l’ange de la France”., la guider et l’assister afin qu’elle rende à notre patrie son honneur, sa liberté et sa nationalité. D’ailleurs, d’après les chroniqueurs de l’époque, lorsque l’armée de Jeanne délivra Orléans un 8 mai (une des fêtes de Saint Michel), on vit apparaître l’ange sur le pont, au moment de l’assaut, repoussant les Anglais.

La haute qualité de « l’ange de la France » et son action passée pour elle nous rappellent la mission exceptionnelle qui est celle de notre peuple, et la place particulière que la France occupe au rang des nations.

La dévotion à Saint Michel est un devoir incontournable qui permet :
– d’honorer un être particulièrement proche de Dieu, et qui joue un rôle éminent dans la Création.
– de remercier l’ange gardien de la France et d’implorer son secours pour que notre pays soit délivré de maux difficilement guérissables.
– de s’assurer une puissante assistance dans la lutte contre les Ténèbres, et une protection précieuse, spécialement quand vient l’heure de quitter ce monde. »

Thibaut de Chassey

[tiré de L’Héritage n°3]

Notes   [ + ]

1. Ces neuf pierres représentent les dons distribués entre les neuf chœurs des anges, et que Lucifer comme leur chef possédait à lui seul.
2. C’est-à-dire qu’il occupait parmi les êtres créés jusque-là la première place.
3. En se basant sur ce passage de l’Apocalypse (XII, 3-4) : « un grand dragon rouge, ayant sept têtes et dix cornes, et sur ses têtes sept diadèmes. Sa queue entraînait le tiers des étoiles du ciel, et les jetait sur la terre. » Les anges sont souvent comparés aux étoiles dans la Bible, puisqu’ils appartiennent tous à un « monde céleste ».
4. L’archange Gabriel dit au prophète Daniel : « Michel se tient constamment debout pour la défense du peuple de Dieu ».
5. Le prophète Daniel parle de l’opposition entre Saint Michel, protecteur de l’ancien Israël, et l’ange gardien de la Perse.
6. D’après certains auteurs, Michel apparut, combattit et terrifia les Alamans, nous donnant ainsi miraculeusement la victoire.
7. A cette occasion, Saint Michel se présente à la jeune bergère comme “l’ange de la France”.

Le soleil de Bouvines

La survie de la France tient à peu de choses.
Qu’on se rappelle qu’à la suite du partage de Verdun (843) , elle n’était qu’un royaume à la périphérie du Saint Empire. Menacée à l’Ouest par l’Angleterre, à l’Est par l’Empire, la France n’a dû sa survie qu’à la volonté tenace d’une famille, les Capétiens.
Ces efforts conduiront enfin sous le règne de Saint Louis à l’officialisation par la papauté de l’indépendance effective du royaume face à l’Empire.

La bataille décisive de Bouvines est là pour nous rappeler que l’indépendance de notre nation fut toujours fragile et mérita tous les efforts de nos chefs.

Cette victoire éclatante, de par son retentissement formidable, doit être classée parmi les « mythes fondateurs » de la nation française. C’est sur un plateau qui domine d’une dizaine de mètres les marécages de Flandres, près de Lille, que s ‘est joué le destin de notre peuple. Pour la première fois depuis l’époque gauloise, une véritable armée populaire, levée par les communes, a réveillé le sentiment national.

1214 : la situation est grave, dramatique même. Lisons ce qu’en dit Jacques Bainville dans son Histoire de France : « Philippe Auguste s’occupait d’en finir avec les alliés que Jean Sans Terre avait trouvé en Flandre, lorsque l’Empereur Othon s’avisa que la France grandissait beaucoup. Une coalition des rancunes et des avidités se forma: le Plantagenêt, l’empereur allemand, les féodaux jaloux de la puissance capétienne, c’était un terrible danger national. »

Les coalisés espéraient broyer la puissance franque. Jean Sans Terre devait débarquer en Poitou et marcher sur Paris par le Sud. Au Nord s’avanceraient Flamands, Allemands et Hollandais. A l’issue des hostilités, le royaume devait être partagé entre les vainqueurs. Paris devait revenir au comte de Flandre.
Averti de ces menaces, Philippe Auguste lève deux armées.

Dès le 2 juillet, Jean sans Terre, dont l’armée constitue la pointe sud de la tenaille est terrassé par le prince Louis à la Roche- au- Moine, en Anjou. Au nord, Philippe Auguste guette les coalisés massés à la frontière du Hainaut. C’est à Bouvines qu’aura lieu le choc décisif .

En face de l’armée franque, les Impériaux, animés par la volonté d’anéantir le royaume.
Un soleil de plomb écrase la plaine et aveugle les Impériaux.
L’Empereur Otton se tient là, dans son armure : un dragon surmonté d’un aigle d’or. Il a juré d’en finir avec la France. Soudain, un silence impressionnant traverse les lignes françaises. Philippe Auguste, au centre de nos troupes, s’adresse aux combattants: « En Dieu est notre espoir, notre confiance. Le roi Otton et son armée ont été excommuniés… Ils sont les ennemis de la religion. »

Notre général en chef est un Frère Hospitalier, vêtu de la tunique rouge croisée de noir. Puis, les trompettes crachent leur musique de mort.

Enfin les deux masses d’hommes se heurtent.
La bataille est longtemps indécise.
Les contingents des communes lâchent pied devant l’infanterie teutonique, Philippe Auguste est même jeté à bas de son cheval avant d’être délivré par des chevaliers francs.

Le sort de la bataille sera finalement dû à la fougue et au courage de la chevalerie franque, qui trace des sillons de sang dans les rangs impériaux.
« On les vit à plusieurs reprises, par escadrons massifs, comme un énorme projectile, traverser de part en part les rangs ennemis. » (Funck-Brentano, le Moyen-Age).

Enfin, la victoire tant espérée se profile.
Otton s’est enfui, les Impériaux sont défaits.
Le nombre de prisonniers est considérable.
L’enthousiasme dans le royaume est énorme. Jamais on n’oubliera le soleil de Bouvines.

Jean Dartois

[tiré de L’Héritage n°1]

L’effroyable assassinat maçonnique de la princesse de Lamballe

Parlant des Francs-Maçons et de leurs forfaits, dans son admirable encyclique Humanum Genus, le Pape Léon XIII a écrit ces lignes : « Il n’est pas rare que la peine du dernier supplice soit infligée à ceux d’entre eux qui sont convaincus, soit d’avoir livré la discipline secrète de la Société, soit d’avoir résisté aux ordres des chefs ; et cela se pratique avec une telle dextérité que, la plupart du temps, l’exécuteur de ces sentences de mort échappe à la justice établie pour veiller sur les crimes et pour en tirer vengeance. »

Rien n’est plus vrai, en effet.

La Franc-Maçonnerie profite de toutes les circonstances pour frapper ceux dont elle a décidé la mort.

Quand ses victimes sont des personnages en vue, elle prend, d’ordinaire, ses mesures pour que l’assassinat soit mis sur le compte des passions politiques ; ainsi elle opéra surtout pendant la Révolution. Par exemple, il est certain que plusieurs meurtres essentiellement maçonniques furent commis à Paris, à la faveur des horribles massacres de septembre.

Citons le cas de la princesse de Lamballe.

Cette infortunée princesse, qui fut – personne ne l’ignore – l’amie dévouée de la reine Marie-Antoinette, avait eu la faiblesse, en 1777, de se laisser affilier à la Franc-Maçonnerie, dont elle ne soupçonnait pas les tendances.
Le but de la secte était, à cette époque, d’accaparer quelques personnes de la Cour, surtout celles admises dans l’intimité des souverains. La princesse aimait les fêtes ; on la prit par son faible.

Elle fut initiée par la Loge La Candeur, de Paris.

En 1781, elle fut élue Grande Maîtresse de la Mère Loge Ecossaise d’Adoption, c’est-à-dire qu’elle fut mise à la tête des Loges de Dames. Le jour de son installation, la « Sérénissime Sœur de Lamballe », le maillet en main, put entendre le Frère Robineau lui chanter, au nom du rite, des couplets fort galants :
« Amour, ne cherche plus ta mère/Aux champs de Gnide ou de Paphos/Vénus abandonne Cythère/Pour présider à nos travaux. Etc… »

D’un esprit très léger, elle ne comprit pas ce qui se tramait dans les Loges et n’ouvrit les yeux que lorsque la Révolution eut éclaté.
Mais alors elle fit son devoir sans aucune défaillance. Elle s’efforça de réparer le mal dont elle avait été la complice inconsciente. En novembre 1791, elle prit l’initiative de la surveillance qu’il était nécessaire d’exercer sur tous les foyers de conspiration. La secte jura de lui faire payer de sa vie son loyal retour au bien.

Au 10 août 1792, la princesse de Lamballe suivit, avec le plus grand courage, la famille royale à l’Assemblée, puis au Temple. Dans la nuit du 19 au 20 août, elle fut transférée à la Force.

Son sacrifice était héroïque ; elle savait, la malheureuse, quel sort l’attendait. On en a la preuve.

En effet, c’est après la fuite de Varennes (juin 1791) que la princesse avait eu les preuves du rôle joué par la secte. Chargée d’une mission en Angleterre, elle avait constaté, avec douleur, l’influence que les Loges exerçaient sur Pitt, le conseiller du roi Georges ; celui-ci avait refusé son intervention, Pitt avait été jusqu’à dire que Louis XVI n’avait que ce qu’il méritait. Après un court séjour en Angleterre, la princesse était passée à Aix-la-Chapelle ; c’est à ce moment qu’elle avait brisé les liens maçonniques. Elle avait rompu avec la secte, et, circonstance significative, fait aussitôt son testament ; ce document, qui a été publié, est daté du 15 octobre 1791. Puis, elle était rentrée en France, pour lier son sort à celui de la famille royale.

Le 3 septembre 1792, à la Force, elle comparut devant le tribunal de sang, présidé par le franc-maçon Hébert. Sa vaillante attitude a été immortalisée par Peltier et Bertrand de Molleville. Conduite dans la rue du Roi-de-Sicile, elle fut égorgée par les massacreurs. Un de ces misérables voulut lui enlever son bonnet avec la pointe d’un sabre et la blessa au front ; un autre la renversa d’un coup de bûche ; elle fut achevée à coups de sabre et de pique. Son corps fut mutilé, telle était la rage de ces scélérats ; on lui arracha le cœur ; on coupa sa tête, qui fut promenée, au bout d’une pique, jusque sous les fenêtres du Temple.

Plus tard, en 1796, ses assassins furent jugés. L’un des principaux, Nicolas Le Grand, franc-maçon, fut condamné à vingt ans de fers ; un autre, nommé Charlat, également franc-maçon, s’était engagé pour aller combattre les Vendéens, mais il fut tué par ses camarades, à qui il faisait horreur à raison de sa participation au crime.

Hiram

[paru dans L’Héritage n°1]

Face cachée d’un monstre : Lénine

La vie de Lénine commence par un traumatisme : la mort de son frère, un gangster impliqué dans des attentats sanglants. D’où la haine animale que ce « Russe » qui ne sait pas rouler les « r » voue à toute forme d’autorité. Informé par sa mère de ses origines juives, il préfère en garder le secret auprès de ses proches. Cependant, il laissera percer son admiration pour ses origines : « Un Russe intelligent est presque toujours un Juif ou quelqu’un avec du sang juif dans les veines » dira-t-il.

En outre, il semble être obsédé par la mission dévolue au peuple juif et n’hésite pas à déclarer : « Les juifs formeront les cadres principaux de la révolution et porteront le socialisme dans les masses russes les plus arriérées ».

Alors que le bolchevisme n’est encore qu’une secte, Lénine met au point la monstrueuse « théorie des 80 kilos », toute imprégnée de matérialisme. Précisons au passage que le matérialisme dialectique élaboré par Kiessel Mordechai plus connu sous le nom de Karl Marx est issu de la dialectique qu’Hegel avait extraite de la Kabbale! Pour Lénine, le révolutionnaire professionnel se doit donc d’organiser son corps autour de 4 tranches de 20 kilos : étude / Discipline de fer/ révolutionnaire professionnel/ parti d’élite.
La guerre est pour Lénine une aubaine. Dès 1914 il prophétise: «Pas de révolution sans bain de sang. Nous ne faisons pas la guerre contre les personnes en particulier, nous exterminerons la bourgeoisie comme classe. » Son fanatisme est tel qu’il effraie ses camarades. En avril 1917, il apostrophe avec une vive irritation Zinoviev, aux mêmes origines, qu’il juge trop modéré. C’est qu’il n’est guère soutenu au sein de la secte bolchevique que par Alexandra Kollentaï, une propagandiste de l’amour libre !

Pendant quelques semaines, Lénine qui possédait quelques petits millions de francs suisses, connaît l’épreuve la plus dure de sa vie. Avec Zinoviev, il doit gîter la nuit et s’abriter sous une meule de foin. Le pauvre homme doit plus tard essuyer des « calomnies » : les bolcheviques sont accusés d’être des affidés de Berlin. Trotsky ne craindra pas le ridicule en écrivant dans son Histoire de la révolution russe : « Juillet 17 fut le mois de la plus grande calomnie dans l’histoire mondiale ». N’en déplaise à Lev Davidovitch Bronstein (Trotsky), le ministre allemand des Affaires Etrangères, Kulman, va à l’encontre de ces allégations en déclarant en septembre 1917 : « Le mouvement bolchevique n’aurait jamais pu atteindre la taille ou l’influence qu’il a aujourd’hui sans notre soutien continuel » .

Pour le malheur de la civilisation, Lénine s’empare du pouvoir.
Il imagine alors le mythe fondateur de l’URSS, la « prise  » du palais d’Hiver. Les archives soviétiques ont récemment révélé qu’elle n’avait jamais existé…

Arrivé au pouvoir, Lénine donne à sa bande de gangsters un mot d’ordre : « Pillez tout ce qui peut être pillé ». Le futur syphylique en profite pour proclamer le principe de la liberté sexuelle et dépénalise l’homosexualité. L’avortement est légalisé. Lénine a aussi la géniale idée d’instaurer un « bureau de l’amour libre ».

La police politique, la Tchéka est aussi une de ses inventions. Djerzinski, nommé à sa tête proclame « Pour faire ce travail, il faut des anges ou des démons, moi je n’ai que des démons ». Reconnaissons au moins à l’homme le sens de la formule historique.

Mais tant de sang répandu finit par dévorer l’homme qui succombe à la maladie. L’agonie est effroyable. Lénine se cache parfois pendant des semaines dans un petit bâtiment, en refusant de voir la moindre personne.

En 1923, un tchékiste du NKVD, tenant la garde devant la cabane de Lénine, entend un hurlement inhumain qui ne ressemble à rien. Il sort et voit Lénine, emmitouflé dans une sorte de draperie, la tête tournée vers la lune…

Lorsqu’il meurt le 21 janvier 1924, la température de son corps monte brusquement à 42,3°C…le thermomètre éclate ! Ainsi s’achève la vie du “saint du communisme”.

Gyula

[paru dans L’Héritage n°1]

L’« Histoire passionnée de la France » de Jean Sévillia

Éd. Perrin, 559 p., 2013 ; éd. Pocket (poche), 492 p., 2015.

[Rappel : les recensions de livres sont à considérer comme des tribunes libres]

À 64 ans, Jean Sévillia est un auteur et un journaliste très prisé dans les milieux conservateurs catholiques. […]

Au risque de déplaire aux bobos cathos, nous déconseillons l’achat et la lecture de ce piètre bouquin au titre trompeur. Si vous aimez la France et son histoire, passez votre chemin. Ce livre n’est pas pour vous !

Pavé de 500 pages, cette Histoire passionnée de la France n’est qu’une x-ième  histoire de France politiquement correcte avec un vernis catho-conservateur des plus minces… On a peine à croire que tant d’acteurs de la mouvance dite nationale se soient crus obligés d’encenser un tel ouvrage !

Écrire un livre sur l’histoire de France nécessite de faire un tri dans les événements que l’on va relater. Il est impossible de raconter entièrement 1 500 ou 2 000 ans d’histoire en 500 pages. L’historien se doit de faire une sélection des éléments les plus importants, les plus significatifs de l’histoire nationale pour construire son livre. Ce premier travail est forcément orienté politiquement. Avant même la narration proprement dite, le choix de parler de tel ou tel événement et pas d’un autre, révèle grandement la pensée de l’auteur. A ce sujet on notera que Monsieur Sévillia dans son premier chapitre nous afflige en parlant de l’homme de Cro-Magnon, de l’homme de Néandertal, de l’Homo Erectus vieux de 450 000 ans et autres billevesées évolutionnistes.

Jean Sévillia n’a vraiment pas une approche catholique de l’histoire de France. Pour lui, à l’instar des « historiens » gauchistes, la France n’est pas née avec le baptême de Clovis : « Au VIe siècle, la France n’existe pas ! » Mais Monsieur Sévillia est de droite, il ne peut faire débuter la France en 1789 comme ses petits camarades de gauche. Non, pour lui la France naît quelque part entre les Capétiens et la Guerre de Cent ans…

Tout le bouquin est du même tonneau. La bataille de Poitiers est torchée en trois lignes pour nous dire qu’elle n’a pas eu l’ampleur que lui a donnée la légende.

La figure de Du Guesclin est évoquée sur une seule page, l’épopée de Jehanne d’Arc sur deux, mais, en revanche, Jean Sévillia nous gratifie de sept pages sur le pitoyable Valéry Giscard d’Estaing (pour, en plus, nous en dire du bien).

Sévillia évoque la St Barthélémy et la responsabilité des catholiques sans parler un instant de la multitude des massacres, destructions et profanations dont les Huguenots se sont rendus coupables à travers toute la France. Bravo pour un catho !

Si Jean Sévillia critique la Révolution française, c’est toujours avec modération et sur les trente pages qu’il accorde à cette période, il commet l’exploit de ne jamais citer la franc-maçonnerie et son action… Les guerres de Vendée tiennent sur un peu plus d’une page et les autres soulèvements contre-révolutionnaires ne sont même pas mentionnés.

À la manière des francs-maçons de droite, Jean Sévillia semble être un fan de Napoléon à qui il accorde pas moins de 42 pages. Il tempère toutefois son propos pour avouer que Napoléon était un petit peu dans la « démesure ».

Il traite de la Commune sur trois pages (plus que pour Jehanne d’Arc) sans dire un mot sur la forte implication maçonnique de cet épisode. En revanche, un peu plus loin, page 355, il raille l’existence d’un « mythe du complot maçonnique », ce qui est très révélateur de la pensée de ce monsieur.

D’ailleurs, sur les cinq pages qu’il octroie au funeste Jules Ferry, il omet bien évidemment de dire qu’il était franc-maçon, information pourtant capitale afin de comprendre pourquoi ce monsieur s’est acharné à combattre l’Eglise et à déchristianiser la France !

C’est donc sans réelle surprise que Jean Sévillia attaque violemment Edouard Drumont sans expliquer le contexte de l’époque alors qu’il le fait pour dédouaner Jules Ferry concernant ses propos sur les « races inférieures ».

Le socialiste Jean Jaurès obtient deux pages très complaisantes. Les dix-huit pages concernant la 1ère Guerre Mondiale ne sortent pas des sentiers battus. Pas un mot sur la volonté de détruire le dernier empire catholique des Habsbourg, il accrédite la thèse farfelue de l’attentat de Sarajevo.

Concernant la 2e Guerre Mondiale, la narration reste bien entendu très convenue. La réoccupation de la Ruhr et l’affaire des Sudètes sont bien évidemment des « provocations » nazies. Pas un mot sur la responsabilité du Traité de Versailles. « L’Angleterre et la France n’ont pas d’autre solution que de déclarer la guerre à Berlin » (sic!). Le gouvernement de Vichy ne fut qu’une « dictature personnelle » au bénéfice du Maréchal Pétain… S’ensuit une série  de pleurnicheries sur le statut des Juifs et sur la déportation. Le Général De Gaulle est porté au pinacle. Seul point positif, Jean Sévillia nous épargne les habituels récits sur les camps de la mort même s’il souscrit totalement à la version officielle.

Sa vision de la guerre d’Algérie est également scandaleuse. Il a une vision très gaulliste du drame. La trahison de De Gaulle vis-à-vis des Français d’Algérie est qualifiée de « malentendu » !

Le récit de Mai 68 tient sur quatre pages. Il ne contient ni analyse politique, ni mise en perspective. Il n’a aucun intérêt.

Monsieur Sévillia se livre à une apologie de Georges Pompidou, le larbin de la Banque Rothschild, sur sept pages. Il ne parle pas de la prise en main par les banques privées de la création monétaire avec la loi Pompidou-Rothschild, ni de l’immigration de masse qui se met en place à cette époque à la demande du gros capital.

Sur les sept pages qu’il accorde à la présidence de Giscard, il n’y a pas un mot sur le regroupement familial, la délivrance de la pilule, la légalisation de l’avortement, la facilitation du divorce, etc. ! Qu’on se le dise, Jean Sévillia est un super catho !

Sur les autres présidents de la Ve république : Mitterrand, Chirac et Sarkozy, Jean Sévillia nous livre une logorrhée droitarde, politiquement correcte et sans aucun intérêt.

La conclusion de l’auteur est pitoyable : aimer son pays c’est l’accepter comme il est avec sa diversité, ses croyances, ses nombreuses ethnies, etc.

Bref, la France de Jean Sévillia n’est ni blanche, ni catholique. Ce n’est pas la nôtre !

Paul THORE

[tiré de L’Héritage n°10]

Le corps mortel est régi par l’âme immortelle

par Saint Athanase, IVe siècle

Comment, puisque le corps est naturellement mortel, l’homme raisonne-t-il sur l’immortalité, et désire-t-il souvent la mort pour la vertu ?
Ou encore, comment, puisque le corps est éphémère, l’homme se représente-t-il les réalités éternelles au point de mépriser les choses présentes, et de tourner son désir vers les autres ?

Le corps ne saurait de lui-même raisonner ainsi sur lui-même, ni sur ce qui est extérieur à lui : il est mortel et éphémère ; il faut donc nécessairement qu’il y ait autre chose qui raisonne sur ce qui est opposé au corps et contraire à sa nature.

Qu’est cela encore une fois, sinon l’âme raisonnable et immortelle ? Et elle n’est pas extérieure au corps, mais lui est intérieure — comme le musicien qui avec sa lyre fait entendre les meilleurs sons. Comment encore, l’œil étant naturellement fait pour voir et l’oreille pour entendre, se détournent-ils de ceci et préfèrent-ils cela ?

Qu’est-ce qui détourne l’œil de voir ? ou qui empêche l’oreille d’entendre, alors qu’elle est faite naturellement pour entendre ? Et le goût, naturellement fait pour goûter, qu’est-ce qui souvent l’arrête dans son élan naturel ? La main, naturellement faite pour agir, qui l’empêche de toucher tel objet ? L’odorat, fait pour sentir les odeurs, qui le détourne de les percevoir ? Qui agit ainsi à l’encontre des propriétés naturelles des corps ? Comment le corps se laisse-t-il détourner de sa nature, et conduire par les avis d’un autre, et diriger par un signe de lui ?

Tout cela montre que seule l’âme raisonnable mène le corps. Le corps n’est point fait pour se mouvoir lui-même, mais il se laisse conduire et mener par un autre, comme le cheval ne s’attelle pas lui-même, mais se laisse diriger par celui qui l’a maîtrisé. Aussi y a-t-il des lois chez les hommes, pour leur faire faire le bien et éviter le mal ; mais les êtres sans raison ne peuvent ni raisonner ni discerner le mal, puisqu’il sont étrangers à la rationalité et à la réflexion raisonnable.

Ainsi les hommes possèdent une âme raisonnable ; je pense l’avoir montré par ce qui vient d’être dit.

Que l’âme soit aussi immortelle, la doctrine de l’Eglise ne peut l’ignorer, pour trouver là un argument capable de réfuter l’idolâtrie. On parviendra de plus près à cette notion, si l’on part de la connaissance du corps et de sa différence d’avec l’âme. Si notre raisonnement a montré qu’elle est autre que le corps, et si le corps est naturellement mortel, il s’ensuit nécessairement que l’âme est immortelle, puisqu’elle est différente du corps.

De plus, si, comme nous l’avons montré, c’est l’âme qui meut le corps, sans être elle-même mue par d’autres, il s’ensuit que l’âme se meut elle-même, et qu’après que le corps a été mis en terre, elle se meut encore par elle-même. Car ce n’est pas l’âme qui meurt, mais c’est quand elle se sépare de lui que meurt le corps. Si donc elle était mue par le corps, il s’ensuivrait que, le moteur s’éloignant, elle mourrait ; mais si c’est l’âme qui meut le corps, à plus forte raison elle se meut elle-même. Et si elle se meut elle-même, nécessairement elle vit après la mort du corps. Car le mouvement de l’âme n’est pas autre chose que sa vie, de même aussi que nous disions que le corps vit quand il est en mouvement, et que c’est la mort pour lui quand il cesse de se mouvoir. On verra cela encore plus clairement à partir de l’activité de l’âme dans le corps.

Quand l’âme est venue dans le corps et lui est enchaînée, elle n’est pas resserrée et mesurée par la petitesse du corps, mais bien souvent, alors que celui-ci est couché dans son lit, immobile, et comme endormi dans la mort, l’âme, selon sa propre vertu, est éveillée, et s’élève au-dessus de la nature du corps; comme si elle s’en allait loin de lui, bien que restant dans le corps, elle se représente et contemple des êtres supra-terrestres ; souvent même elle rencontre ceux qui sont au-dessus des corps terrestres, les saints et les anges, et s’en va vers eux, se confiant dans la pureté de l’esprit.

Comment donc, à plus forte raison, détachée du corps quand le voudra Dieu qui l’avait liée à lui, n’aura-t-elle pas une connaissance plus claire de l’immortalité?

Si, quand elle était liée au corps, elle vivait une vie étrangère au corps, à plus forte raison, après la mort du corps, elle vivra et ne cessera de vivre, parce que Dieu l’a ainsi créée par son Verbe, notre Seigneur Jésus-Christ. C’est pourquoi elle pense et réfléchit aux choses immortelles et éternelles, puisqu’elle aussi est immortelle. De même que, le corps étant mortel, ses sens contemplent des choses mortelles, ainsi l’âme qui contemple des réalités immortelles et raisonne sur elles, doit-elle nécessairement être immortelle et vivre éternellement.

Les pensées et considérations sur l’immortalité ne la quittent jamais, mais demeurent en elle comme un foyer qui assure l’immortalité. C’est pourquoi elle a la pensée de la contemplation de Dieu, et devient à elle-même sa propre voie ; ce n’est pas du dehors, mais d’elle-même qu’elle reçoit la connaissance et la compréhension du Verbe de Dieu. »

Contre les Païens, 32 – 33.
[tiré de L’Héritage n°1]

Prière :
Dieu, Tu nous a donné une âme immortelle qui nous distingue des créatures irrationnelles. Aide-nous à la préserver de l’influence du mal et de tout ce qui puisse la salir et l’éloigner de Toi.
Fais-la jouir de ta vérité et accorde-lui de reposer un jour en Toi pour l’éternité. Nous te le demandons par Jésus le Christ notre Seigneur.

Par l’Athénée Pontifical « Regina Apostolorum »